MAI 2000, OREGON (U.S.A.).

Dans l'attente des réponses à ma candidature en écoles d'ingénieur, je voulais partir loin, devenir bilingue, et, pressentant être refoulée partout, démarcher pour trouver du travail en foresterie là où ça brasse: sur la côte ouest du Canada.

Grâce à une chance incroyable et un contact inespéré d'un de mes proches, me voilà en partance, à la dernière minute, pour l'Oregon, où m'attend, en guise de mise en route, un stage dans un ranch. Mon job: marquer une éclaircie dans une forêt de pins et aider sur le ranch à manipuler le bétail à cheval et à moto...

 

12 mai 2000.
T. G. V. Biarritz Paris.
Demain avion direction les USA. Le rêve américain. Mon rêve américain. Mon rêve international. Celui d'oeuvrer pour la sauvegarde et la gestion durable de la forêt par-delà les frontières. Qu'en restera-t-il dans deux ou trois ans ? Aura-t-il survécu à tous ces combats ?
Je me sens si lasse des batailles perdues. Lasse à rentrer dans le rang, perdre ma bataille interne. Trouver un boulot sympa en France. Aller au ski. Avoir un cheval. Trouver un ami sympa. Avoir des enfants. Vivre sans étincelles, le feu mort. Mourir avec un pincement au coeur en effaçant de ma mémoire le moment où j'aurais renoncé, arrêté de me battre, brisée par les coups.

Je ne suis pas admissible oraux des ENITA. Que mon dossier n'aille pas à l'oral d'une école axée vers la foresterie est lourd de signification : mon dossier n'ira aux aux oraux d'aucune école. Il ira rejoindre la pile des dossiers aux notes pas assez brillantes et aux candidats trop âgés. Qu'on me pardonne de ne plus avoir le front boutonneux et de ne pas savoir bachoter servilement. Cela sera peut-être ma perte, mais je n'ai aucun regret à ce sujet : si j'avais été studieuse et appliquée sur vos formules à apprendre par coeur, je ne serais pas ce que je suis, mais un embryon d'existence bien plus terne, bien moins construit. Aucun regret. Juste du dégoût envers ce système qui ne s'intéresse à la valeur des gens mais à des évaluations peu représentatives de leur valeur. Dans une entreprise, je sais que je travaille bien. Tous mes employeurs ont été satisfait de mon travail. Mais comment expliquer cela une entreprise étrangère ? Je n'ai pas (encore) la polyvalence culturelle d'un Stéphane.

On verra. Pour l'instant, une expérience unique m'attend dans l'Oregon, à marquer une éclaircie sur une forêt de pins d'un ranch à 60 000 têtes de bétail. Grâce à Françoise, puisse-t-elle, elle aussi gagner sa bataille contre elle-même.


Chance, ma chance insolente, reste encore avec moi : je n'ai pas encore réussi à m'envoler.

Chacun sa bataille, on est si seul.
Xavier,
Mathieu,
Steph,
Fred,
Arnaud,
Tous ceux que j'oublie.

"Never give up."

 

14 mai 2000.
Petit break avant de continuer la visite. Au soleil.

La journée d'hier aurait pu s'appeler "le jour le plus long", avec un lever à 6 h 30 et un coucher le lendemain à 9 h 00, heure française... En vrac : avion, Katia la française exportée au Mexique, le bus, ses attentes et ses conversations avec tous ces inconnus si secourables qui saluait mon départ plus souvent avec un "good luck" qu'avec un "enjoy your trip" (avais-je tant l'air de partir en expédition ?), l'auberge de jeunesse avec Daniel et Ted, cherchant du taffe dans la région, " fed up with New York ".

Aujourd'hui sera baptisé "four o'clock shower". Pleine d'ardeur et persuadée d'être 7 h 00 AM, j'ai réalisé en sortant de la douche qu'il était en fait 4 h 30 AM. Pauvres voisines de dortoir... Impossible de se rendormir et j'ai fini par partir la conquête de Portland, d'une ligne de bus et d'un petit dej' à 6 h 30... Plusieurs centaines de mètres de rue plus tard, agréables et partagées avec de rares passants qui me saluaient (marchant souvent le long du trottoir avec une impressionnante "cup" à la main : le p'tit dej ' ?), un billet de bus Greyhound, un chocolat chaud et un muffin banane- pépites de chocolat (monstrueux : à la mesure de leur pays...) plus loin, je reviens à l'auberge avec la sensation d'être à l'aise, de pouvoir surmonter le fossé culturel (car il est bien réel) et pouvoir habiter ici quelques années malgré la légèreté des relations humaines. Un homme jeune m'ouvre à huit heures et me réconforte presque de ce côté-là : étudiant en histoire, je n'ai pas compris son prénom mais il est délicieux, sensible et spontané, me semble-t-il.
Enfin bref, pour arrêter de repeindre ces pages en rose, je soulignerait que la toile de fond de toute ces sensations est tout de même très américaine : grosses voitures, grosse bouffe, gros conformisme, etc.... Je mesure la richesse de notre culture et me sens française jusqu'au bout des ongles. Et fière de notre mentalité individualiste et inquisitrice. (C'est français ça, "inquisitrice" ?).

15 mai 2000.
Tout s'emmêle et s'entrechoque. La matière première est faite de toutes les sensations qui peuvent s'accumuler lors d'une journée en termes en terre inconnue : plein de nouveaux mots (mon cerveau commence à réfléchir en anglais), les visages de Niki, Gordon (mes hôtes), Scotty (le gérant du ranch) et ceux que je connaîtrai un peu mieux plus tard, acteurs de "Haycreek", le ranch-village au milieu du "High Desert", mais aussi celui de Cecilia, l'hôtesse du Motel 6 où j'ai passé la nuit, de ce jeune homme du bus Greyhound, Mat, qui parlait pour la première fois une française. Etonnamment pas le visage de Han, à qui j'avais fait écrire son prénom incompréhensible parce que trop simple, et qui m'a donné son numéro téléphone, pour lorsque je repasserais à Portland. Han qui m'a dit de son prénom "short and sweet", sweet, c'est ce qu'il avait l'air, étrangement éveillé, étrangement construit pour un Américain... Etrangement européen peut-être ?

Quoi qu'il en soit, mes yeux sont pleins d'arbres et de leur nom américain : sapin se dit "fir", épicea "spruce", les arbres maudits qui pompent toute l'eau et poussent comme du chiendent "juniper" sont les genévriers, et je ne sais toujours pas si "mes" pins à l'écorce saumon sont des pinus "ponderosa" ou "contorta". Il semblerait qu'il s'agisse plutôt du "ponderosa".

K against Pinus ponderonsa...

Sur le plan écologique, pour succomber à l'envie d'aplanir scientifiquement cette journée, on se trouve sur des hauts plateaux (1600 m) vallonnés. Ce soir, un vent froid c'est mit à souffler, et Niki m'a cité un proverbe d'ici : "En Oregon, si tu n'aimes pas le temps, attends 15 minutes, cela va changer !" Les précipitations sont très faibles, même en hiver, d'où le nom de "High Desert".

"High Desert" (#1)(#2)(#3)

Notes en anglais sur les conditions écologiques du "High Desert"

Côté végétation, il y a cent ans, la région était régulièrement parcourue par des feux de prairie, et l'herbe s'étendait à perte de vue. Aujourd'hui, les feux ont disparu grâce à l'homme, mais le genévrier s'implante et recouvre la surface, pompant toute l'eau. La forêt de pins ("ponderosa pine", "pinus ponderosa") couvre le versant nord des reliefs non utilisés en pâture, avec dans les creux plus humides, du sapin (Abies procera ?). Les pins parfois extrêmement âgés (84 ans pour une souche de diamètre 50 cm, plus des arbres de presque un mètre de diamètre ! !) semblent se plaire et régénérer assez moyennement, mieux surtout si le genévrier n'est pas présent... Les sapins quant à eux, ont de bonnes têtes de dépérissants pour beaucoup d'entre eux (rameaux de détresse) mais il faut noter qu'ils ont subi une attaque d'insectes massive il y a quelque années. Enfin bon, un beau terrain de jeu. J'ai remis dans le frigo un yaourt Yoplait, qui ressemblait presque à un vrai yaourt (jusqu'au moment de le manger), à 99 % "low fat" et qui titre 170 calories alors qu'en France je fais la chasse aux yaourts allégés de plus de 50 calories... Cherchez l'erreur, je crois que cette histoire va finir à la poubelle... J'ai éteint la télé, nulle au possible, et même arrêté le film que m'avait trouvé Niki, nul tout pareil. Entre le pif-paf et la comédie, le cinéma américain, c'est vraiment pas terrible. Le lit (à couverture chauffante) me tend les bras : demain lever à 4 heures du matin pour aller bouger les vaches à cheval, tant qu'elles ne se sont pas séparées de leur veau...

 

24 mai 2000.
Dimanche et voilà déjà une semaine passée Haycreek. Gordon de retour, je lui ai piqué son "truck" pour aller du côté de Bend visiter le "High Desert Museum". C'est donc au volant d'un monstrueux Toy Land Cruiser que je suis partie en quête d'infos sur l'écosystème qui sévit à Haycreek. Bravant les règles américaines circulation (rues énormes, signalisation placée différemment), j'ai finalement déniché un bouquin qui m'a semblé apte à me servir de Bible biologique sur toute la côte ouest...

Les fesses posées sur l'herbe coupée au millimètre près du parc qui jouxte la rivière de Bend (Deschutes River), je regarde vivre les Américains et me remémore cette première semaine : bermuda/T-shirt ou bermuda/torse nu, les chiens sautent dans l'eau pour aller récupérer les balles. C'est décontracté et l'air est doux sans être oppressant comme en milieu d'après-midi.
Il ne manquait plus que la musique pour tourner un bon western : aube sur les montagnes, à la recherche de quelques vaches au milieu de nulle part, les herbes folles, Sam qui trébuche dans les cailloux, quelques combats acharnés pour séparer 40 vaches et leur veau d'un troupeau de 250... Une vraie vie de cow-boy avec toute la part de rêve qui est attachée, et toute la réalité : sur un "drive" de 40 vaches, il y en a toujours au moins cinq pour chier ou pisser juste sous votre nez, donnant au convoi des éclaboussures et des relents dignes d'une fosse septique alimentée aux dragées fuca... Et les selles, bien trop larges, adaptées aux dos de ces damnés Quarter horses, qui transforment les abducteurs en marmelade après deux heures en selle, là où un Selle français et un harnachement anglais nous auraient emmenés jusqu'au crépuscule - j'entends à brûlures de fesses équivalentes --...

Un peu déconnecté, je fais mon boulot comme toujours avec application. Travail, vacances ? Je ne sais pas trop. Dépaysée, je le suis. Oisive, non. C'est ce que j'aime, même si j'en chie, que cinq heures du mat' tous les jours, c'est dur, un cattle drive, épuisant de concentration... Parfois je me dis que je suis en train de réaliser, très exactement et même plus, ce pour quoi je m'étais battue il y a deux étés. C'est très étrange, cela ne me fait rien, mais en y réfléchissant, je conçois que cela puisse être victoire. Une victoire dans un long combat. Seule, je vis à l'autre bout du monde, malgré la langue, la culture, les modes de vie, avec la sensation d'être fière de ma culture et de pouvoir la conserver. Je m'adapte sans me perdre, et continuer à écrire me semble un bon moyen de ne pas aliéner mon langage.

Mes compagnons de travail sont Betty et Javier. Betty en anglais. Javier en espagnol.

 

26 mai 2000.
Tout change et rien ne change. J'en ressortirai plus forte, plus incisive, comme à chaque fois : je parlerai anglais, espagnol même, j'aurai vu au quotidien la vie d'un ranch, goûté à l'équitation de travail, fait connaissance avec un écosystème forestier de la côte ouest des USA... Tout change, je sais, et cela m'est confirmé, que je ne suis pas faite pour l'élevage des bestiaux, manipulation, marquage, tatouages, torture ? L'équitation de travail est fonctionnelle mais impure et sans âme. Sans art devrais-je dire. Chevaux sommairement éduqués, et harnachement parfois inadapté.
La forêt est traitée ici comme beaucoup de choses aux États-Unis : avec gaspillage. On est loin de la gestion optimisée des Landes. Et Gordon a une mentalité de fermier, pas de forestier ; pour lui, un champ avec un arbre est une forêt... Quand à essayer de lui expliquer, la tâche (à laquelle j'ai essayé de m'attaquer) est ardue, entre mentalité forestière américaine (aucune vision d'ensemble ni gestion coordonnée de la propriété) et sa concentration fugitive (je ne sais si c'est l'âge, la multitude de préoccupations, ou si c'est son tempérament qui le rend "girouette"...)...

Et rien ne change : toujours sur un statut "étrange" d'invité travaillant bénévolement, sans ressources, sans chez moi, qu'on prend et qu'on utilise quand on en a besoin. Sans rien qui se construit professionnellement parlant. D'attendre encore et encore que ma vie commence, je suis fatiguée...

 

2 juin 2000.
Je fais mon sac avec la délicieuse sensation de plonger vers l'inconnu. Haycreek, passage fondamental mais passage tout de même, ne me manquera pas. Gordon l'homme d'affaires qui a décrété que j'avais fait du bon travail dans sa forêt - un peu ridicule étant donné la superficie, j'ai beaucoup plus travaillé au ranch que dans ses pins -, Niki si ambiguë et dont j'émet quelques doutes sur sa sincérité à mon égard, Betty si bien dans ses baskets et dont tout l'univers est un ranch, et tout mes "khopains" mexicanos un peu tristes de voir s'envoler la petite nénette française qui mettait un peu de piment dans leur boulot : en bon "latinos", ils roulaient des mécaniques et jouaient les machos, ce qui somme-toute les distrayaient un peu des vaches.
Javier qui parle si vite, Salvador "Salva" qui sait si bien parler aux filles : il est pile poil temps que je m'en aille car la situation entre nous devenait plus qu'ambigue. Je ne regretterai pas les vaches (entre concours de pets et cascades de bouze), et aurai un petit pincement au coeur en songeant à ce qu'il m'aurait été possible de faire sur la forêt de Haycreek, si seulement Gordon avait bien voulu me considérer comme un expert forestier et non comme quelqu'un dont on est même pas sûr qu'il sache marquer une éclaircie... Un petit plan de gestion, là dedans, cela n'aurait pas été du luxe, lui ferait gagner ses soux, et lui éviterait de couper sa forêt n'importe comment...
Petit pincement au coeur, espérons seulement que les suggestions que j'ai pu lui faire lui serviront...

Est-ce que ce train de nuit va enfin s'arrêter ?

Est-ce que pour moi la vraie vie va bientôt commencer ?


3 juin 2000.
L'herbe du petit parc en face de l'auberge de jeunesse sent bon, elle a même des vraies bêtes dedans. Repos. Pas de Han disponibles à l'autre bout de son téléphone mais ce n'est pas grave, je me repose de la matinée en voiture avec Gordon et Niki et de l'après-midi à arpenter Portland. Décidément, je n'aurais jamais eu de Niki que des sensations assez désagréables. Elle pratique un interventionnisme sauvage dans la vie des gens. Fais çi, tu devrais faire ça, moi je sais ce qui est mieux... A eux deux, ce matin, entre leurs radars anti radars de flics et leur GPS dans la voiture, ils m'ont fatiguée, psychiquement parlant. C'est incroyable ce que ces couples américains sont inconsistants et ternes. Oh mon Dieu, les Lakers ont été battus par l'équipe de Portland, et, ce n'est pas possible, tous les Américains ont été éliminés à Roland-Garros......... Et ma fille est merveilleuse : c'est une athlète (il faut entendre comme le dit...). Ce sont des gens très sympa, peut-être, mais ils m'ont FATIGUEE. Et je n'aurais jamais réussi à savoir si elle, je l'agaçais un peu comme je le sentais et contrairement à ce qu'elle montrait...

J'adore l'odeur de cette herbe, mêmes si certaines des bêtes piquent un peu. Je crois que je me suis assoupie sous le feuillage d'un... un érable me semble-t-il. Un couple discute, debout dans une allée du parc. Je n'arrive pas comprendre ce qu'ils disent mais elle se met à pleurer. Il est torse nu et elle a lâché ses cheveux. Un peu plus loin, un jeune homme travaille sur un ordinateur portable. Elle a arrêté de couiner et lui a demandé de lui allumer une clope. Sur la gauche, un moustachu adipeux vient de faire son apparition, un détecteur de métaux à la main... Il s'est accroupi et a commencé à faire des trous dans le gazon... Le couple s'éloigne. Le soleil descend et vient me chauffer le dos. Un écureuil fait une tentative pour descendre (lui aussi) de son arbre mais se déclare intimidé par l'homme au détecteur.

Demain 14 heures j'appellerais Maman qui rentrera d'Ardèche et explorera la boîte aux lettres. Toulouse or not Toulouse. Zat ize ze quechtionne....

4 juin 2000.
Heure d'appeler Maman moins deux. Pas de Han au téléphone hier soir, et en fait, je n'ai pas rappelé, m'étant extirpée avec difficultés du lit de l'auberge de jeunesse où je m'étais écroulée une heure plus tôt en rentrant du parc, pour aller péniblement suivre les directives de Niki : aller voir la "shining parade" de Portland. C'était bien ce que je craignais : une sorte de Corso version américaine et bien moins drôle (personne déguisé si ce n'est les participants et beauf family middle class de sortie) avec des transat et chaises pliantes postées sur le bord du trottoir depuis le début de l'après-midi, véridique ! ! !).
Je suis rentré comme un zombie, cassée de fatigue, titubant presque, pour n'émerger ce matin que vers 8-9 heures (un exploit étant donné les habitudes prises au ranch...). Pour tuer le temps, me voici downtown Portland m'alimentant d'un "brunch". Hot chocolate et "croissant" (voilà un mot que je prononce le mieux que personne ici !). J'ai trouvé un bon spot sur cette place, ni trop au soleil, ni trop à l'ombre, pour regarder vivre les américains ce dimanche matin. Sur les marches, me tournant le dos, un charmant couple homo se masse le dos. Un peu exhibitionnistes, les garçons, comme pas mal d'homosexuels (3615 nous affirmons notre sexualité). La douceur de l'air me fait un peu oublier l'attente : Toulouse or not Toulouse ?
Quelqu'un joue du saxophone dans une rue avoisinante.

... Et Roman m'a adressé la parole...

Le même jour plus tard.
Mom on phone. Elle avait l'air OK. L'air de vivre sa vie. Rien dans la boîte aux lettres. Je crois que la poste française débloque complètement, depuis six mois. Le suspense reste donc entier. J'ai une bouteille d'eau, une barre chocolat noir aux amandes, un bouquin de Rudyard Kipling avec une couverture en vieux cuir qui pue et l'herbe du petit parc sous les fesses. Ingrédients pour une bonne fin d'après-midi à ne rien faire ?

(Japanese Garden in Portland, OREGON)(#1)(#2)(#3)

5 juin 2000.
Ce léger contretemps, ne pourrais-je pas le mettre à profit pour aplanir les choses ?

Premièrement : dès que je rentre en France, il me faut changer de banque. J'ai autre chose à faire, bien plus intéressant, mais là, la coupe est pleine ; une banque qui vous met dans la panade à l'étranger parce qu'une sale conne n'a pas fait son boulot, il faut s'en débarrasser. Pas de virement, pas de sous sur le compte, pas de carte bleue, pas de location de voiture, pas d'optique Nikon de 50 mm (que j'avais fini par trouver ! ! !), appel maman à la rescousse pour des histoires de sous (encore), pas de départ à Seattle... etc.... etc.... Changer de banque.
Deuxièmement : les écoles. Toujours pas de lettres de Toulouse, ce qui ressemble fort une mauvaise nouvelle... Donc : louer la voiture, voir s'il est possible de repousser mon vol. Pas de Toulouse voudrait dire retour éventuel pour l'ENGREF le 26 juin, ce qui me laisse éventuellement 20 jours pour trouver du boulot sur Vancouver, Seattle, éventuellement Portland. En fait une semaine à chercher et deux semaines à bosser... Faisable ? ? ? ?
Han est en vacances mais les américains n'arrètent pas de m'adopter : hier, Roman (très scié par mes théories sur les relations de couple), hier soir et ce matin Glenn, sortant un peu de sa cambrousse et très inquiet de se jeter dans l'inconnu, ce soir Daniel l'internaute déchaîné au "notebook" (ordinateur portable) dézingué. Qui avait dit que je voyageais seule ? Pas longtemps, en tout cas, il faut croire.

6 juin 2000.
Pas de carte bleue, pas de voiture, pas de Seattle, pas de recherche de job.
Pas de réponse de Toulouse... Je tourne en rond un peu désemparée...

 

7 juin 2000.
Hier soir enfin, la carte bleue se décide à me donner accès à mon compte et j'hérite d'une (grosse) voiture coréenne, la plus petite de l'agence de location.
Ce matin sur le départ, un coup de fil à maman résout le problème numéro deux : pas de Toulouse (370 dossiers, 70 à l'exam, 4 pris je crois).
Sans un regard en arrière, je charge la mule et prend la route direction Vancouver direct : il me faut faire avancer le schmilblick.